Nous avons dit dans le dernier article que les sri lankais
acheteurs de saphir dans la ville d’Ambatondrazaka cherchent à tout prix une
maison ou une pièce à louer afin de la transformer en un salon d’attente et de
réception des chanceux explorateurs. Il est clair qu’ils paient beaucoup plus
que les locataires ordinaires. Si la location mensuelle d’une petite pièce de 4
x 4 coûte ordinairement autour de 40.000 ariary, les sri lankais osent faire un
contrat de bail de trois mois à plus de 200.000 ariary par mois, outre les
travaux de réfection. Si vous étiez à la place des locateurs, ne seriez-vous
pas tentés de donner congé à vos locataires ordinaires et mettre les pièces jusque-là
louées par ces derniers à la disposition de ceux qui paient plus ? C’est
bien logique dans la loi du commerce…
Mais lorsque le profit prend le dessus, que se
passe-t-il ? C’est ce que les malgaches appellent « Nahita ny akanga
tsara soratra ka nanary ny akoho taman-trano », qui signifie littéralement :
on s’est débarrassé de la poule de la maison car on a trouvé beau le plumage d’une
pintade. On préfère ainsi la pintade à la poule accoutumée de la maison. 40.000
ariary, c’est vraiment peu par rapport à 200.000 ariary. J’aurai évidemment roulé
pour la plus grande somme, mais je préfère me retenir… Un jour, j’ai demandé à
un monsieur responsable d’un cyber pourquoi ils n’ont pas fait louer leur
boutique. Il m’a sagement répondu : « Ce n’est qu’éphémère… Nous
avons choisi de continuer malgré le peu de rentabilité ! » A une mère
de famille s’adresse l’appel pressant de l’une de ses filles : « gardez-vous
de prendre congé de nos locataires, même si ces derniers venus ont plus de
possibilité ! ». Cet appel est d’une formidable humanité. Imaginez un
peu que vous avez loué un local pour y travailler (multiservice :
photocopie, saisie, impression) depuis un certain temps, tout à coup, le
locateur vous dit : « j’ai besoin tout de suite de cette pièce, je
vous prie de vous déménager ailleurs ». Et là, vous restez bouche bée,
sans savoir où aller… A la fin, faute de local, vous ne pouvez pas travailler :
une mort lente !
L’argent n’est jamais amer, mais l’être humain est une
richesse extraordinaire…